Il n’y a encore pas si longtemps, quand la DRH me présentait le prochain incentive, j’avais tendance à faire la tête. Au cours de ma carrière, j’ai travaillé pour plusieurs entreprises qui savaient davantage manipuler le bâton que la carotte. Dans ces boîtes de la vieille école, challenge commercial on nous demandait de nous donner à fond mais donnait très peu en retour. Et se donner à 300 % durant une semaine pour remporter un panier garni. La société pour laquelle je travaille désormais a heureusement être un peu mieux qualifiée pour manager. Parce que quand elle suscite un incentive, la rémunération est à la hauteur de l’effort exigé. Et ça, ça change tout. Du coup, c’est avec joie que je découvre le prochain challenge commercial, et je me donne à 200 %. L’année dernière, j’ai ainsi remporté un portable, une box, des places VIP pour des matchs de foot… Si je me réjouissais déjà de ces primes en nature, il y a quelques semaines, j’ai cette fois décroché la timbale : un voyage de quatre jours en Mongolie ! Au début, je dois admettre que je n’étais pas franchement chaud à cette idée. J’aurais préféré partir en voyage avec ma femme. Parce que voyage avait lieu entre collègues, naturellement. Je n’étais pas transporté par le concept. Partir en voyage avec des collègues, ce n’est pas véritablement du travail, mais ce n’est pas non plus des vacances. On ne se conduit pas de la même manière au travail et à la maison. Il y a un rôle à jouer, celui du type qui se divertit car il est en vacances… tout en faisant quand même attention à ses faits et gestes, parce que les autres sont à portée d’oreilles. Enfin, ça, c’est ce que je pensais. Parce qu’une fois arrivé, j’ai surtout pris conscience qu’un voyage entre mecs, ça permet aussi d’être naturel. Mais d’un naturel un peu différent de celui qu’on a avec sa femme. J’ai perdu un paquet de neurones au cours de mon séjour, mais je dois dire que ça fait tout de même un bien fou. Je craignais surtout que les activités proposées sur place soient une calamité. Vous avez déjà sans doute vécu ce genre de choses : vous vous retrouvez coincé dans une activité où vous avez l’impression d’être dans un Disneyland en carton pâte. J’ai déjà eu l’occasion de vivre ce genre de moment lors d’un voyage, et ça ne m’a vraiment pas plu. Mais la DRH a, là aussi, su s’en sortir avec les honneurs : c’est une agence événementielle qui a tout organisé de bout en bout, et nous a préparé un séjour vraiment authentique. Si celui-ci s’est révélé assez riche, ça a été un vrai bonheur : il ne s’agissait pas d’un séjour touristique (le colon blanc venant s’amuser chez les indigènes), mais d’un séjour authentique où nous avons non seulement découvert la culture locale mais également échangé avec les habitants et entre collègues. Je craignais surtout que les activités qu’on nous propose sur place soient navrantes. Vous savez, comme ces chasses au trésor où on a vaguement l’impression de revenir en colo. La direction a fait d’une pierre deux coups, sur ce coup-là : elle a satisfait les collaborateurs en leur proposant un voyage, et a surtout permis à ces derniers de resserrer leurs liens. C’est depuis mon retour que je me dis que je suis en définitive arrivé à destination. Pendant une longue période, j’ai changé de boîte comme de chemise. Alors qu’aujourd’hui, je ne regarde même plus regarder ailleurs. Et vous savez quoi ? Ca fait du bien, de poser ses malles.

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